L’hiver est toujours bien là.
Après la tempête, le froid est revenu avec un grand vent de nord-est.
Les noisetiers ont bien fleuri mais leur beaux chatons pleins de pollen n’ont pas pu être visités par les butineuses. Dommage, un bon apport de protéines fraîches aurait été le bienvenu pour élever les jeunes larves.
Les premières fleurs aussi ne peuvent pas être visitées.
Alors nos avettes doivent continuer de taper dans les réserves.
(N.B. « avettes » est le terme littéraire ancien pour désigner les abeilles. Au pays de Ronsard c’est donc celui que nous utilisons souvent pour parler de nos petites préférées.)
Ces réserves, qu’il est très important de contrôler en mars par les pesées arrières (voir article n° 3), sont constituées :
- du miel qu’elles ont butiné l’année dernière
- des compléments que nous leur avons donnés en fin d’été (on vous en reparlera au moment venu) ou, en cas d’urgence, maintenant
- du pollen qu’elles ont stocké dans des alvéoles en périphérie du couvain sous forme de « pain d’abeille » (agglomérat de pollen, miel, nectar et enzymes) dans lesquelles le pollen a pu effectuer sa lactofermentation et devenir ainsi plus digeste. Le pollen est indispensable au fonctionnement des glandes hypopharyngiennes productrices de la gelée royale.
Elles ont donc tout ce qu’il leur faut ?
NON : il manque l’élément nécessaire à tous les êtres vivants : l’eau !
L’eau représente 70% du poids d’une abeille (et 80 % du poids d’une larve).
En fin d’hiver, avec la reprise de la ponte, une colonie pourrait consommer jusqu’à 0,25 litre par jour.
Alors où trouver l’eau ?
Il en reste très peu dans le miel qui a cristallisé (sa meilleure forme de conservation).
Il n’y en a pas dans le pollen.
Dans la ruche, il y a l’humidité ambiante (néfaste quand il y en a trop) qui peut se condenser et être récupérée par les abeilles.
L’abeille est aussi capable de réduire ses propres pertes d’eau en fermant temporairement certains stigmates et en en récupérant une partie en fin de transit digestif.
Mais en période sèche, comme en ce moment où le taux d’hygrométrie est très bas, c’est insuffisant : alors il faut aller chercher de l’eau.
Pour de l’eau, les butineuses sont capables de sortir alors qu’il ne fait que 7 à 10° dehors (pour du nectar ce n’est qu’à partir de 15° qu’elles sortent).
Elles se réchauffent avant de s’envoler en activant leurs muscles thoraciques, comme pour chauffer l’intérieur de la ruche (voir article n°1).
C’est un travail épuisant : lourdement chargée il est encore plus difficile à la porteuse d’eau de rentrer à la ruche quand le vent s’en mêle, ce qui est aussi le cas depuis une semaine.
Projetées par un coup de vent dans l’eau froide, beaucoup d’abeilles, épuisées, y périront.
Mais cela fait partie du cycle de vie de l’abeille qui ne devient butineuse que dans ses derniers jours.
L’eau régurgitée par les butineuses à leur retour, peut aussi être stockée par des abeilles remplissant un rôle d’ « abeilles réservoirs » pour les autres, mais cela ne représente que de très faibles quantités.
Une colonie peut mourir de soif.
À la Huberdière, elles trouvent de l’eau dans les mares et étangs voisins mais aussi dans l’abreuvoir des poules qui est très proche des ruches.
En photo :
En vidéo, avec seulement le son du vent, des poules et des abeilles qui, elles, n'ont pas besoin de la voix du metteur en scène :
Alors que nos poules sont du genre « féroce » avec les sauterelles, les papillons, et même les serpents qu’elles se disputent, je ne les ai jamais vues prendre une abeille dans leur abreuvoir : tout le monde boit tranquillement ensemble.
Si quelqu’un a une explication à ce phénomène : je suis preneur.
On peut aussi confectionner des abreuvoirs spécifiques pour les abeilles en mettant des flotteurs (tranches de bouchons en liège) et des graviers pour qu’elles puissent s’accrocher ou en fabriquant des systèmes où l’eau s’écoule doucement sur une planche en bois (non traité !).
Tiens, en voilà une qui se trompe de buvette ou qui cherche un peu de chaleur:
Au passage, vous voyez comme les butineuses, bien concentrées sur leur objectif, ne piquent pas inutilement sauf si, par exemple, on en coince une entre les orteils en marchant en nu-pieds dans du petit trèfle en fleur (n’est-ce pas Olivier ?). C’est un acte désespéré où elle perdra la vie et fera perdre une ouvrière à la colonie. Ce n’est pas le même comportement que celui des gardiennes qui veillent à la protection de l’ensemble de la colonie et qui n’hésitent donc pas à se sacrifier pour cela.
D’un point de vue sanitaire, les points d’eau peuvent aussi devenir pour les abeilles, un lieu de contamination lorsque certaines abeilles sont porteuses de maladies (spécifiques aux abeilles). Donc, lorsqu’on leur met à disposition des abreuvoirs, il faut penser à les nettoyer et à renouveler l’eau régulièrement, car elles peuvent aussi venir d’ailleurs. C’est bien connu : ce n’est que celles des autres qui sont malades, les étrangères porteuses de tous les maux, et jamais les siennes (… ou pas ?).
Merci de votre attention et …
… à bientôt sur http://miel-et-abeilles-en-touraine.over-blog.com
Henri
(Remerciements et Bibliographie : voir l’article n° 0 http://miel-et-abeilles-en-touraine.over-blog.com/article-0-remerciements-et-bibliographie-43600752.html )