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4 juin 2010 5 04 /06 /juin /2010 11:50

« Mai, le joli mai… »

« En mai, fais ce qu’il te plaît ! »  

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Chez les abeilles aussi, le dicton fonctionne.

En mai, l’apiculteur lui, ne fait pas ce qui lui plaît : il trime pour faire ce qu’il y a à faire. Henri nous a parlé de la laborieuse récolte du miel de printemps (cf article n°13). Mais c’est qu’en plus, nos blondinettes se croient tout permis et nous font courir.

En mai, les filles ont la fièvre…la fièvre d’essaimage, c’est le nom.

Essaimer signifie : se diviser pour aller gagner de nouveaux territoires et perpétuer ainsi l’espèce.

Ce processus d’extension-appropriation est naturel mais pas toujours du goût de l’apiculteur car nous sommes des éleveurs et comme tous les éleveurs, on aime bien garder et faire fructifier ce que l’on élève.

Quand les abeilles ont la fièvre d’essaimage, nous sommes fébriles aussi.

Mais avec un peu d’humilité et de philosophie, nous pouvons accepter et même aussi profiter du phénomène.

Rappelez-vous : à la visite de mars, on constate des cadres remplis de couvain. Les colonies grossissent, préparent leurs bataillons de butineuses aux premières récoltes de nectar.

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En avril, les mâles naissent (voir article n°11), ce qui veut dire que de jeunes reines peuvent être élevées par la colonie, fécondées ensuite en vue de prendre la relève.

Seulement, dans une colonie, il ne règne qu’une reine. Si la vieille reine est morte de sa belle mort ou perçue en fin de vie par ses ouvrières, les abeilles vont décider d’en élever une nouvelle. Dans sa cellule royale,

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la jeune larve va recevoir la nourriture suprême : la gelée royale. C’est cette nourriture exceptionnelle qui fera la différence pour obtenir une reine plutôt qu’une ouvrière. Au départ, l’œuf est le même. C’est toujours cette gelée royale qui fera que la reine sera finie à 16 jours contre 21 jours pour une autre abeille. Entre le 5ième et le 15ième jour après sa naissance elle pourra faire son premier vol : le vol nuptial au cours duquel elle sera fécondée par les faux-bourdons (voir l’article n°11). La jeune reine deviendra donc la nouvelle mère de la colonie qui va ainsi perdurer.

Si la vieille reine n’est pas morte et pas encore complètement décatie et qu’un certain nombre de conditions sont réunies (forte population, manque de place, exposition chaude de la ruche, floraisons abondantes…) les abeilles décident d’élever une jeune reine et de faire partir la vieille reine avec un grand nombre d’entre elles (la moitié de la colonie environ soit 15000 abeilles). Certes détrônée mais aussi élue pour gagner de nouvelles contrées et pour perpétuer la race.

Celle-ci est parfois peu alerte : abdomen lourd avec tous ses œufs qui y restent et manque d’exercice depuis plusieurs mois voire années selon son âge. Quand la fièvre d’essaimage commence, les ouvrières la préparent au grand départ : elles lui font faire de l’exercice forcé. En lui mordillant les pattes, elles l’obligent à courir sur les cadres pour se dégourdir un petit peu en prévision du grand voyage.

La fièvre d’essaimage se perçoit lors de notre visite quotidienne au rucher. Les mâles volent bruyamment devant les planches d’envol, ça ronfle dans les chaumières, il y a beaucoup d’agitation devant les ruches, et les ruchettes pièges sont beaucoup visitées par les éclaireuses qui cherchent un nouveau logis où conduire l’essaim qui partira.

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Beaucoup d’agitation mais pas beaucoup de travail productif, au grand dam de l’apiculteur.

Nous aussi, ressentons la pression qui monte. Nous sommes en permanence les oreilles aux aguets, ressentons le moindre degré de température supplémentaire qui va les tenter pour aller faire un « petit tour ». 

Il est midi, l’heure de quitter le jardin. Mais qu’est-ce donc cette clameur montant tout droit du rucher ? Nous nous précipitons pour être aux premières loges.  Que constatons- nous ? Beaucoup d’agitation devant telle ruche et puis tiens, il n’y a plus personne dans la hausse ! Cela veut dire qu’elles sont toutes redescendues dans le corps de ruche pour se rassembler et pour se gorger de miel avant le grand départ.

Le soleil perce à travers les nuages. Le vent s’est apaisé un peu (voire pas du tout cette année). Le bourdonnement des mâles devant la ruche fugueuse s’intensifie. D’un coup c’est la moitié de la colonie qui sort de la ruche par la porte et la vieille reine est aspirée dans le mouvement. Elles forment un nuage qui s’élève dans les airs : c’est l’essaim. Il s’élève, avance en zigzag. L’organisation complexe ne tient rien du hasard.

La vieille reine, souvent lourde et impotente ne va pas réussir à s’envoler et reste sur la planche d’envol ou tombe lourdement devant la ruche. Nous voyons l’essaim qui fait quelques mètres, s’aperçoit que la reine n’a pas suivi. Il décide de faire demi-tour et revient à la ruche. Il retentera une autre sortie dans quelques heures vraisemblablement. Peut-être la reine a-t-elle encore droit à une séance de gym avant la deuxième tentative.

Nous avons été souvent surpris de voir les abeilles s’envoler, se poser massivement sur le pré et rentrer à la maison aussi vite qu’elles en étaient sorties. La manœuvre ne  dure pas plus de 10 minutes. Si nous n’étions pas postés là à observer : rien n’y paraîtrait plus, ni vu, ni connu.

Généralement, l’essaim parvient avec la reine à faire quelques mètres et fait une première halte sur un pieu ou une branche à proximité du rucher.

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Il y reste parfois quelques heures seulement ou plus d’une journée. Parfois, le temps d’aller chercher  le matériel de capture et nous revenons pour constater que tout le monde est parti.

En principe, nous attendons les heures moins chaudes de la fin de soirée pour intervenir. Il y a autant de façons de cueillir un essaim que d’essaims. Et la partie n’est jamais gagnée : il faut parfois rivaliser d’imagination avec  les coquines pour y arriver. Pas rare de passer une heure à les faire rentrer dans une ruchette et de constater le lendemain matin qu’elles ont déjà pris la poudre d’escampette car les éclaireuses ont choisi un autre logis.

Voici déjà quelques essaims que nous avons eus à capturer chez nous ou chez d’autres personnes qui nous ont appelés. C’est à chaque fois une aventure, parfois sportive, parfois dangereuse, ou encore « trop facile ». Nous pratiquons généralement à deux, c’est plus facile et tellement plus excitant ! Chacun y va de sa technique et des paris sur l’aboutissement de celle préconisée par l’autre.

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Cet essaim est très haut dans l’arbre au-dessus du rucher.

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Henri sort la grande échelle, grimpe avec la ruchette et la maintient à bout de bras au risque d’être déséquilibré à un moment donné. Il secoue la branche au-dessus de la ruchette ouverte. Le plus gros de la grappe tombe dedans mais ressort immédiatement : la reine a dû rester sur la branche. Les abeilles y retournent et se perchent encore plus haut. Nous abandonnons la partie pour l’instant. Le lendemain, l’essaim repart et va directement trouver logis en la ruchette placée sur l’écurie des ânes. Elles ont gagné et nous aussi !

 

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Cet essaim :

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n’est pas allé plus loin que le pieu d’en face les ruches. Nous les rentrons en fumant. Elles rentrent directement par la porte, cela augmente les chances qu’elles y restent. L’essaim restera et servira à renforcer une colonie faible.

Cet essaim :

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s’est installé sous les tuiles d’un vieux toit : Henri démonte tuiles et rayons de cire qu’elles ont déjà construits car à cette période de l’année les cirières sont très actives et construisent des rayons en des temps record. Nous récupérons de la charpie de couvain, d’abeilles, de miel…inutilisable. Mais nous laissons un toit en état et débarrassé de ses hôtes : plusieurs heures passées et attendons toujours le remerciement du propriétaire : nous n’acceptons plus de capturer les essaims sous toiture.

Cet essaim :

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très gros est accroché dans la haie près du rucher. Nous allons secouer le gros de la grappe sur la ruchette puis la poser par terre sur un drap.

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Un deuxième secouage les fait tomber sur le drap, les rabatteuses font leur travail et appellent les autres à rentrer en levant l’abdomen pour découvrir la glande de Nasanov qui va libérer la phéromone de rassemblement. 

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Vidéo des rabatteuses en plein travail :

Elles rentrent en rangs serrés dans la ruchette où la reine est tombée par chance tout de suite dedans. La ruchette sera placée à l’ombre puis changée d’endroit. C’est un bel essaim qui a construit très vite et a pu être enruché rapidement avec une reine qui pond déjà.

 

Cet essaim :

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(photo prise par Renaud)

est arrivé un bel après-midi dans une jolie propriété de Touraine. Il veut s’installer dans la cheminée. La propriétaire nous appelle pour la débarrasser de ces visiteuses. Nous lui préconisons d’allumer tout de suite du feu dans sa cheminée et cela les fait fuir. L’essaim se regroupe sur une jeune branche de marronnier qui ploie sous son poids impressionnant. Sans doute 2 ou 3 essaims en un. Il faudra une grande ruche avec une hausse pour le loger intégralement.

 

Nous pourrions vous raconter encore beaucoup d’histoires d’essaims. L’heure est maintenant à l’enruchement des nouveaux essaims et aux fusions avec les ruches faibles. Cela fera l’objet de prochains articles.

Merci de votre fidélité et …

… à bientôt sur http://miel-et-abeilles-en-touraine.over-blog.com

Marie-France

(Remerciements et Bibliographie : voir l’article n° 0 http://miel-et-abeilles-en-touraine.over-blog.com/article-0-remerciements-et-bibliographie-43600752.html ) 

 

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commentaires

B
Bonjour,<br /> de belles photos d'essaims et agréable à lire, bon printemps à vous,<br /> cordialement, B.
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H
<br /> <br /> Merci pour votre message, c'est, en plus, un grand plaisir de recevoir un petit air de Cévennes, ces montagnes que j'affectionne tant.<br /> <br /> <br /> Bien apicalement<br /> <br /> <br /> <br />
M
<br /> Je suppose que d'autres vous ont signalé que la vidéo est toute blanche, mais par contre je crois bien avoir entendu les abeilles.Si par contre je suis la seule, je vais être très vexée!<br /> Le miel blanc a quasiment disparu le temps d'un week end. En reste t'il?<br /> <br /> <br />
Répondre
M
<br /> <br /> Bonjour Micheline,<br /> <br /> <br /> Vous êtes la première à signaler ce problème. S'agit-il de la vidéo "des rabatteuses" dans l'article 14? A l'instant je les vois toujours bien (pas d'écran blanc). Pouvez-vous réessayer plus tard<br /> et me dire si les abeilles sont revenues chez vous. Aviez-vous pu voir les vidéos précédentes?<br /> <br /> <br /> Pour le miel de printemps : pas de problème, vous pouvez contactez Marie-France par la messagerie habituelle.<br /> <br /> <br /> Bien amicalement,<br /> <br /> <br /> Henri<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> <br />
M
<br /> Qu'est- que c'est intéressant quand même ! On apprend vraiment beaucoup de choses avec vous. Merci infiniment pour cette leçon de choses. bisous. marie-line<br /> <br /> <br />
Répondre
M
<br /> <br /> Merci pour toutes tes éloges.<br /> <br /> <br /> Nous avons plaisir à partager notre passion avec nos lecteurs fidèles.<br /> <br /> <br /> Bisous de nous deux.<br /> <br /> <br /> <br />

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