Janvier 2010 : c'est l'hiver, il fait froid :
- Comment vont les abeilles?
- Que font-elles?
- Que faites-vous pour elles?
Nous avons souvent entendu ces questions, et, ces questions, nous nous les posons tous les jours devant ces boites silencieuses :
Bien sûr on peut taper sur la ruche pour les entendre réagir. Cela nous dira seulement qu'il y en a encore en vie, mais rien de plus.
On aura juste réussi à les stresser et à déclencher un besoin supplémentaire d'énergie à une époque où elles ont bien besoin de toutes leurs réserves.
Soulever le couvercle? Ouvrir la ruche?
C'est assurément faire rentrer le froid dans la maison et les mettre en danger surtout si elles ont commencé à élever du couvain.
Le mieux c'est de ne rien leur faire! Tout ce qui était sous notre contrôle a du être fait avant : isolation du toit, nourrissement complémentaire si nécessaire, regroupement des colonies trop faibles pour passer l'hiver, traitement contre le varroa....
Maintenant il faut leur faire confiance : elles savent lutter contre le froid (jusqu'à -20° voir -30° suivant les auteurs).
Elles forment une grappe que les abeilles de l'intérieur chauffent par leur thorax (mais sans battre des ailes) pendant que celles en périphérie assurent l'isolation en se serrant très fort les unes aux autres.
Au centre de la grappe, les abeilles peuvent bouger pour se nourrir, élever le couvain, nettoyer, toujours nettoyer, puis venir remplacer les abeilles de la périphérie pour qu'elles se réchauffent à leur tour.
Elles vont ainsi maintenir, au centre de la grappe, une température de l'ordre de 25° (le strict minimum serait de 18°) puis de 35° pour pouvoir élever le couvain et ce, quelle que soit la température extérieure.
La reine, qui a arrêté de pondre après les gelées de fin novembre, reprend sa ponte dès mi-janvier pour préparer le printemps et la relève des abeilles d'hiver.
Alors pour savoir "comment vont les abeilles?" il nous faut observer devant et dessous :
- devant la ruche dès qu'il y a un rayon de soleil,
- dessous la ruche en récupérant sur une plaque les déchets de l'activité des abeilles (toutes nos ruches sont équipées de planchers ajourés pour assurer une bonne aération et permettre ces observations).
Il fait 10°, un rayon de soleil : les voilà!
Elles sont bien vivantes.
Elles en profitent pour faire un "vol de propreté".
Il s'agit de vider l'ampoule rectale qui a pu conserver les excréments plus de 3 semaines alors qu'elles étaient confinées à l'intérieur par le froid.
Ce n'est pas le jour à mettre des draps blancs à sécher sur le fil à linge!
Et maintenant retirons la plaque métallique placée sous le plancher pour observer les déchets.
L'inspecteur mène l'enquête.
C'est bien connu : les poubelles regorgent d'informations intéressantes sur les occupants d'un lieu.
Les anciens médecins regardaient aussi les pots de chambre.
D'ailleurs la première observation que nous faisons c'est d'apprécier l'odeur dégagée : elle sent bon.
Un mélange de senteur de propolis, de cire, de miel, d'humidité et de chaleur : c'est un bon signe!
D'autres odeurs (âcreté par exemple) pourraient être inquiétantes.
Que voit-on?
- La grappe s'est installée au sud, au dessus de la porte d'entrée. Elle occupe 4 à 5 inter-cadres : c'est bien.
- Les abeilles ont su profiter des moments moins froids pour aller taper dans les réserves du fond de la ruche.
Cette colonie est bien active.
Regardons maintenant d'un peu plus près :
- Il y a un varroa (taille 1,5 à 2 mm) parmi les déchets d'opercules.
Un seul pour plusieurs jours de présence de la trappe : ça va, pas d'inquiétude.
Le varroa est un acarien, parasite des abeilles, arrivé en France en 1982.
Même si on ne l'aime pas en apiculture, il faudra bien lui faire un article spécial (par exemple en été, période favorable à son expansion).
Et là : c'est quoi?
- Ce sont des écailles (taille 1 à 2 mm) de cire transparente toute fraîche : il y a donc de jeunes abeilles qui commencent à devenir cirières.
C'est un très bon signe de vitalité de la colonie.
La cire est sécrétée par des glandes cirières, elle sort, sous la forme de ces écailles, des flans de l'abdomen, entre les premiers anneaux.
Ce sont les jeunes abeilles (entre 12 et 18 jours) qui en produisent le plus.
Normalement elles retravaillent tout de suite ces écailles en les mastiquant puis en utilisant la cire obtenue à bon escient, mais quelques écailles peuvent leur échapper.
Chaque écaille pèse moins de 1 mg, donc pour faire une bougie comme celle-ci (qui brûlera quand même plusieurs heures), il en faut de l'ordre de 100.000!
Vous ne regarderez plus la flamme de la même façon.
Et maintenant revenons encore une dernière fois à notre tiroir-poubelle, mais c'est pour le meilleur :
DEUX OEUFS!
(longueur d'un oeuf : 1,5 mm)
La reine est vivante et elle a repris sa ponte : c'est parfait!
Est-ce qu'ils lui ont échappé?
Étaient-ils mal collés au fond de leur cellule?
Est-ce les ouvrières qui les ont enlevés car il n'en faut qu'un par cellule?
Étaient-ils mal fécondés? Dans ce cas ils auraient donné des mâles et il n'y en a pas besoin à cette époque.
...? ...? ...?
La nature et les abeilles nous étonneront et émerveilleront toujours.
Du moins, tant qu'il y en a encore.
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Pour chauffer, pour produire de la cire, pour élever le couvain et produire de la gelée royale, les abeilles ont besoin d'énergie et de plus en plus à partir de la reprise de la ponte de la reine.
Cette ponte va aller en s'accélérant en vue des bataillons de butineuses nécessaires au printemps.
Est-ce que la météo va être favorable lors des premières floraisons?
Le mois de mars est appelé le mois de tous les dangers pour la survie des colonies.
Il est finalement bien plus inquiétant que les grands froids du coeur de l'hiver comme nous venons de le voir.
Est-ce que les réserves vont être suffisantes?
Serait-ce le thème du prochain article?
Merci de votre attention et ...
... à bientôt sur http://miel-et-abeilles-en-touraine.over-blog.com/
(Remerciements et Bibliographie : voir l’article n° 0 http://miel-et-abeilles-en-touraine.over-blog.com/article-0-remerciements-et-bibliographie-43600752.html )